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2010 mar. 7

Le chameau sauvage

Le Chameau Sauvage

Je suis en train de lire "Le chameau sauvage" de Philippe Jaenada et c'est excellent. L'auteur prend un malin plaisir à décrire les scènes en y insérant des parenthèses pour ajouter des détails, ou son opinion personnelle à la façon d'une petite voix qui parlerait (genre voix-off). C'est très bien écrit et surtout c'est vraiment drôle. Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas poilé tout seul dans le métro, le nez dans un bouquin.

Je vous met un petit extrait pour le plaisir (la parenthèse dans la parenthèse finale m'a beaucoup fait rire).

Extrait de "Le chameau sauvage" de Philippe Jaenada:

De toute façon et je le savais depuis longtemps (ce n'est pas une croyance personnelle, c'est l'un de ces impénétrables axiomes inscrits dans les tables de fonctionnement du monde, comme la loi des séries ou la vitesse constante de la lumière), on croise toujours deux fois les gens qui nous intéressent. La vie donne une deuxième chance, par gentillesse ou charité, ou parce que ça l'arrange. C'est alors à nous de ne pas commettre de boulette, de ne pas louper cette deuxième occasion, car nous n'en aurons plus d'autre (il ne faut pas demander la lune). Il reste à espérer que lorsque nous serons mis de nouveau en présence de la personne (par exemple: tous les deux dans le même wagon du métro), nous ne serons pas en train de lire un romain captivant ou de discuter à bâtons rompus avec quelqu'un, car alors nous passerons le reste de notre vie à nous demander si elle va se décider à venir un jour, cette deuxième rencontre, oui ou non? C'est pourquoi, quand nous avons manqué la première chance, ensuite nous devons bien faire gaffe. (Il faut que nous fassions notre part d'efforts, que nous nous secouions (tiens, c'est curieux ce mot), la vie n'a rien à voir avec Jésus-Christ et la bienveillance sans bornes).

2010 fév. 2

Bill Watterson is not dead

Bill Watterson

Il y a quelques années de cela, alors que je n'étais encore qu'un jeune innocent avec toutes ses illusions, je fis la connaissance de "Calvin et Hobbes" de Bill Watterson. Cet auteur exprimait de façon tellement comique les tourments de la jeune enfance qu'il me prit l'idée de lui écrire pour lui exprimer toute mon admiration devant son œuvre. Malheureusement je fis chou blanc, le bonhomme restait introuvable sur la toile. Et là, après 21 ans de silence (d'après l'article) et alors que son dernier album est sorti il y a 15 ans, Monsieur Bill Watterson himself répond à l'interview d'un journaliste dans "The Plain Dealer".

Si l'article ne donne pas plus de renseignement sur le "comment contacter le bonhomme" (bien qu'on nous dit que l'interview c'est faite via email), je comprend maintenant pourquoi mon initiative de jeunesse était voué à l'échec. Bill Watterson semble aimer sa tranquillité, et c'est tout à son honneur. Si vous lisez la réponse de John Campanelli (l'auteur de l'article) aux commentaires de son article, il y dit[1]:

 
Merci beaucoup pour vos commentaires.

 Je ne prétendrais pas que les questions que j'ai posées étaient parfaites, loin de là, je pense qu'une des raisons, probablement la plus importante, pour laquelle j'ai obtenu des réponses est que je n'ai pas posé des questions comme "Que faîtes vous ces jours-ci"?, "quel est votre passe temps actuellement?" ou "que manigancez-vous?". 

Je suis resté concentré sur la bande dessinée et seulement cela. 

Je pense que des questions sur sa vie privée, ce qui nous intéresse tous, auraient anéanti toute chance d'avoir une réponse. 
 
 Alors que nous voulons tous en savoir plus sur lui, nous devons nous rappeler et respecter le cadeau qu'il nous a fait avec sa bande dessiné et respecter sa vie privée.
 
Merci

Calvin et Hobbes fait parti de mes grands favoris en matière de bande dessiné (avec beaucoup d'autre) et je trouve du génie à Bill Watterson d'avoir si bien rendu la candeur et l'innocence de la jeunesse (si on peut dire cela de Calvin). Maintenant que je sais que l'auteur de ce chef d'œuvre vit en quasi autarcie ou, en tout cas, coupait des strasses et des paillettes, cela me le rend encore plus sympathique.

Notes

[1] Traduction faîte à la main

2009 nov. 8

Blast - grasse carcasse

Blast - grasse carcasse

Je viens de terminer la lecture de "Blast" de Manu Larcenet, 200 pages de pur bonheur. Non pas que le livre soit particulièrement joyeux (c'est même plutôt le contraire), mais l'auteur s'est fait plaisir dans les dessins et les textes et cela se ressent à chaque page.

J'avais adoré lire "le combat ordinaire" ou même "le retour à la terre" du même auteur, mais j'ai l'impression qu'avec "Blast", Manu Larcenet passe encore a un niveau supérieur (niveau de quoi? je ne saurais dire). J'attendais avec impatience la sortie de cette album, mainte fois cité sur son blog, surtout après avoir vu la bande annonce et je n'ai pas été déçu.

J'aime évidemment beaucoup le graphisme de cette bande dessinée mais les textes sont vraiment très bons. Je ne résiste d'ailleurs pas à vous en livrer un extrait.

Extrait de "Blast - grasse carcasse":

L'alcool, au même titre que n'importe quel produit qui modifie la perception, est un formidable outil d'expérimentation intellectuelle... hypocrite époque qui exalte les modifications corporelles douloureuses... souffrir pour maigrir, se muscler la viande ou s'affermir le croupion... se tatouer, se percer, se gonfler de plastique, se faire drainer la graisse comme on vide une fosse septique, se faire charcuter le nez, les joues, les lèvres, les mamelles, les complexes... ... mais dès qu'on exprime le désir de modifier l'esprit, surtout au travers d'une délicieuse ivresse, on devient un méprisable déséquilibré...

Le seul point négatif du livre étant, il faut le souligner, que ce n'est qu'un premier volet (enfin j'espère). "Grasse carcasse" présente largement le personnage principal, pose légèrement une intrigue mais cela s'arrête là. C'est excellent et je vous le conseille vivement, mais sachez qu'il faudra patienter pour avoir la suite (c'est frustrant).

2009 oct. 3

C'est à moi, ça!

C'est à moi, ça!

Je viens de découvrir "C'est à moi, ça!" de Michel Van Zeveren et c'est un excellent bouquin. Évidemment c'est un livre réservé aux connaisseurs (les jeunes) mais si vous voulez faire un cadeau à un 2/5 ans (et plus), c'est une grande idée.

C'est l'histoire d'une grenouille qui trouve un œuf. Si ce bouquin m'a bien plus c'est qu'il est très drôle, ce qui n'est pas si fréquent dans la littérature jeunesse.

Du même auteur, j'ai également lu "Et pourquoi ?" qui est nettement moins bon selon moi (même s'il exorcise un peu le "mal" des 2/3 ans, le "pourquoi-ci-pourquoi-ça").



2009 sept. 25

Là où vont nos pères

Là où vont nos pères

J'ai récemment découvert "Là où vont nos pères" de Shaun Tan, c'est un petit chef d'oeuvre. Je ne dirais pas que c'est une bonne bd car personnellement je ne mettrais pas cet ouvrage dans la catégorie bd. En effet, même si on comprend tout à fait la trame de l'histoire, l'ouvrage ne contient aucun dialogue. C'est juste une succession de dessins tous plus soignés les uns que les autres: un petit chef d'oeuvre.

L'auteur illustre parfaitement les chocs culturaux auxquels est confronté un nouvel arrivant dans un pays inconnu. Le titre est un peu pathos mais l'ouvrage ne l'est pas du tout. Cela se "lit" super vite (forcément) mais c'est plutôt agréable.

Si vous avez l'occasion de le feuilleter, n'hésitez pas.

2009 juil. 3

Gemma Bovery

Gemma Bovery J'ai découvert les romans graphiques avec "Gemma Bovery" de Posy Simmonds. Ma rencontre avec ce livre n'est pas banal car je ne souhaitais pas le lire en premier lieu, il ne m'était d'ailleurs pas destiné.

Un roman graphique se présente d'abord comme un roman, les sites marchants qui classent ce livre dans les bandes dessinées se trompent selon moi (et ceux qui le classent dans humour n'ont pas dû le lire). "Gemma Bovery" se présente sous la forme d'un carnet de route illustré, c'est plutôt bien fait.

En ouvrant ce livre pour la première fois donc, je m'attendais à y trouver une bd. Comme ce ne fut pas le cas, je partais d'ores et déjà avec un a priori négatif. Mais c'était sans compter sur les vertus addictive de l'ouvrage. Il suffit dans lire les premières phrases pour avoir l'envie de continuer. C'est un peu comme un paquet de nounours à la guimauve, on ne veut pas commencer mais si on le fait, on est obligé de finir. Et comme je suis un sadique patenté, je vous livre dès à présent les premières ligne de ce roman.

Extrait de "Gemma Bovery":

Gemma Bovery est en terre depuis trois semaines. Les gens ont commencé à oublier - en tout cas, je n'en entend plus parler dans la boutique. Mais moi... je ne peux pas m'arrêter de penser à elle. Le pire, ce sont les nuits. Si je m'endors, je rêve de ses yeux morts qui ont le bleu du vitrail.

Mon nom est Raymond Joubert. J'ai fait bien des choses dans ma vie mais depuis sept ans, je me contente de diriger la boulangerie familiale, ici, à Bailleville. Je suis normand, fils de boulanger. En dépit de mes séjours à l'étranger, de mes travaux d'écriture, de mon intérêt pour l'histoire des communications, je pense être resté un homme simple.
Si je me sens contraint d'écrire aujourd'hui sur la récente tragédie survenue dans notre petite ville, c'est pour tenter de comprendre ce qui c'est passé, pour découvrir les faits et, de là, l'étendue (ou les limites) de ma culpabilité.

Posy Simmonds a sorti un second roman graphique qui s'appelle "Tamara Drewe", c'est également un bon bouquin même si j'ai préféré "Gemma Bovery" (pas physiquement, car physiquement Tamara est mieux, mais Gemma a une vie plus passionnante... quoique, enfin, ce n'est pas le sujet).

2009 mai 17

Aya de Yopougon

Aya de Yopougon Je viens de terminer le quatrième et dernier album (à ce jour) de "Aya de Yopougon" de Marguerite Abouet. J'ai tout de suite était séduit par le style, le vocabulaire qui regorge de "dêh!" et de "Ô!", tout nous plonge dans l'ambiance d'un Abidjan décomplexé et surtout bien loin des clichés misérabilistes auxquels nous avons droit habituellement lorsqu'on parle de l'Afrique.

L'histoire ressemble à un "Sex in the city" ivoirien, on suit les aventures d'une poignée de personnages (essentiellement féminins) qui gravitent autour d'Aya, une jeune abidjanaise très studieuse qui rêve de devenir médecin.



Je ne résiste pas à l'envie de vous copier un extrait de dialogue pour vous transmettre un échantillon de l'ambiance verbale de cette bd.

Extrait de "Aya de Yopougon" tome 2:

- Où est ton frère? - Albert? il dort. - Il sort tous les soirs en ce moment, dêh! - Il fait prodada(1) les nuits, maman. - Il est peut-être amoureux... - De qui? - Mais Adjoua, d'une fille. - Elle doit être vilaine dêh, vu comment il la cache. - Mais Adjoua, même si elle ressemble à cabri, je vais l'accepter - Toi, maman? sans mettre ton palabre(2) dans leur histoire? - Mais quel palabre? C'est sa vie Ô...

Et le petit bonus des livres est qu'ils offrent en fin d'ouvrage des recettes de cuisine, des conseils mode... etc... et un très apprécié lexique d'expressions du français ivoirien.

Pour résumer, si vous cherchez un livre dépaysant, facile à lire et qui donne le sourire, je vous conseille vivement de vous procurer cette excellente bande dessinée.



(1) prodada: personne aimant les fêtes rien que pour se montrer, se pavaner.
(2) palabre: discussion prolongée et oiseuse.